Définition de la majorité
La majorité, ou “al-joumhour” en arabe, désigne linguistiquement la partie principale ou la plus grande partie d’une chose, dans le contexte des savants en Islam, le terme “majorité” fait référence à l’accord de la plupart des savants sur un jugement juridique spécifique, tout en pouvant y avoir un avis divergent parmi eux.
Selon cette définition, lorsque les spécialistes de la jurisprudence islamique s’alignent majoritairement sur une interprétation ou une décision concernant un aspect religieux, cela constitue l’opinion de la majorité. Cette dynamique révèle l’essence collaborative et consultative de la science islamique, où diverses interprétations se confrontent et s’enrichissent mutuellement.
L’un des hadiths célèbres illustrant cette méthode est : “Ma communauté ne s’accordera jamais sur une erreur.” Cela souligne l’importance de la collégialité et de l’accord majoritaire pour renforcer les fondements de la foi et des pratiques islamiques, même lorsque des perspectives variées coexistent.
Qui Sont les savants de la majorité en Islam ?
Dans la jurisprudence islamique, l’expression “savants de la majorité” fait référence aux partisans des quatre écoles de pensée principales : hanafite, chaféite, malékite et hanbalite. Lorsqu’un avis majoritaire est évoqué sur une question juridique, il représente l’opinion de la majorité de ces écoles. Par exemple, si une question offre deux interprétations, l’une selon les chaféites et l’autre selon les “savants de la majorité”, cela implique que les écoles hanafite, malékite et hanbalite partagent l’autre avis.
- École Hanafite : Fondée par l’imam Abû Hanîfa al-Nu’mân ibn Thâbit al-Taymî, cette école, née en 80 de l’hégire (699), se base sur l’ijtihad dans l’interprétation des textes sacrés. Abû Hanîfa était connu pour son refus des opportunités matérielles et administratives, se focalisant sur la jurisprudence et l’analyse des opinions religieuses, notamment en favorisant l’usage du raisonnement analogique en dehors des peines prescrites. En raison de son époque marquée par les troubles et la propagation des informations douteuses, il comptait sur des récits strictement vérifiés de hadiths.
- École Malékite : Fondée par l’imam Mâlik ibn Anas, né à Médine en 93 de l’hégire (711). Mâlik a commencé à étudier le savoir dès son plus jeune âge, devenant mufti à 21 ans. Il est célèbre pour son livre “Al-Muwatta” et pour sa stricte adhésion à la tradition médinoise. Son approche en jurisprudence inclut le Coran, la Sunna, l’ijma’ des savants de Médine, ainsi que des principes comme la “mursala” (considération des intérêts publics) et l'”istihsan” (préférence juridique).
- École Chaféite : Fondée par l’imam Muhammad ibn Idris al-Chaféi, né en 150 de l’hégire (767). Expert en hadith, il a étudié sous l’égide de grands savants comme l’imam Mâlik. Auteur de “Al-Risala”, il a consigné les fondements de la jurisprudence islamique, mettant en avant le Coran, la Sunna, l’ijma’, et le raisonnement analogique. Son école diffère quelque peu sur certains points entre les périodes passées à Bagdad et en Égypte.
- École Hanbalite : Fondée par l’imam Ahmad ibn Hanbal, né en 164 de l’hégire (780), connu pour sa rigueur mémorielle et sa fermeté face aux autorités. Bien que l’imam n’ait pas rédigé son école de jurisprudence, ses disciples l’ont compilée à partir de ses enseignements. Ses principes incluent le Coran, la Sunna, les avis des compagnons, le raisonnement, et la prise en compte de l’intérêt général (“maslaha mursala”).
Ces quatre écoles représentent collectivement l’opinion majoritaire dans l’islam sunnite, chacune ayant contribué au développement de la jurisprudence islamique à travers leurs interprétations des textes sacrés.
Raisons des divergences entre les savants
Les divergences entre les savants islamiques sont un phénomène naturel, directement lié aux textes juridiques pour plusieurs raisons :
- Les textes religieux peuvent être interprétés de manière différente en raison de leur nature parfois ambiguë ou de leur authenticité variable.
- Certains éléments des textes peuvent ne pas être pris en compte par tous les savants.
- Les preuves peuvent ne pas être connues de tous les savants de la même manière.
Chaque savant développe sa propre méthode pour extraire les décisions juridiques des textes religieux. De plus, les savants diffèrent dans leur évaluation des intérêts religieux qui sous-tendent ces décisions, cette diversité dans les interprétations est en fait une bénédiction pour la communauté musulmane, permettant une certaine flexibilité et évitant des contraintes trop sévères.
Toutefois, cela ne signifie pas que les savants cherchent la facilité pour eux-mêmes, car ils sont tenus de suivre la vérité. Nous suivons ceux qui se rapprochent le plus de la vérité, leur but étant de suivre le Coran et la Sunna. Les divergences surviennent souvent à cause des interprétations ou des analogies différentes qu’ils appliquent.
En ce qui concerne l’interdiction de la division mentionnée dans le Coran, Allah dit :
« Et cramponnez-vous tous ensemble au câble d’Allah et ne vous divisez pas » (Sourate Al-Imran, 3:103)
et
« Ne soyez pas comme ceux qui se sont divisés et se sont mis à diverger après que les preuves leur furent venues » (Sourate Al-Imran, 3:105).
Les exégètes expliquent que la division interdite est celle qui concerne le rejet des messagers. Si un savant contredit une parole du Prophète Muhammad (paix et bénédictions d’Allah soient sur lui), son opinion est rejetée. Les savants continuent de diverger sur certaines questions tout en étant unis dans leur vénération pour Allah, Son Prophète, et la loi islamique. Chacun d’eux a des preuves pour étayer ses points de vue.
Le Prophète Muhammad (paix et bénédictions d’Allah soient sur lui) a dit :
« Lorsque le juge juge, il fait un effort d’interprétation et il arrive à une bonne conclusion, il a deux récompenses. S’il fait un effort d’interprétation et se trompe, il a une seule récompense. »