Les Grands Péchés en Islam (Kabā’ir): Guide Complet pour la Piété

Dans l’Islam, la notion de grands péchés, ou “kabā’ir” (الكبائر), est fondamentale pour comprendre l’éthique et la jurisprudence islamiques. Ces péchés sont considérés comme particulièrement graves et entraînent de lourdes conséquences spirituelles et parfois légales. Cet article explore en détail la nature de ces péchés, leur classification, et les enseignements des érudits islamiques à leur sujet.

Qu’est-ce que les Grands Péchés ?

Définition et Nature des Grands Péchés dans l’Islam

Les grands péchés en Islam sont ceux qui comportent une gravité et une sévérité particulièrement élevées. Le Coran et la Sunna (les traditions du Prophète Muhammad, paix et bénédictions sur lui) fournissent des directives sur ce qui constitue un grand péché. Ils incluent des actions telles que le polythéisme (shirk), le meurtre, l’usure (riba), l’adultère, et le vol.

Nombre et Classification des Grands Péchés

Les érudits islamiques ont débattu du nombre exact de ces grands péchés, certains les chiffrant à soixante-dix, d’autres à plus ou moins. Ibn Abbas, un compagnon du Prophète, a suggéré qu’ils sont plus proches de soixante-dix que de sept. Cependant, il n’y a pas de consensus sur un nombre spécifique, reflétant la diversité des interprétations et des opinions dans la jurisprudence islamique.

Les Sept Péchés Destructeurs

Identification des Sept Péchés Majeurs

Le Prophète Muhammad a spécifiquement identifié sept péchés comme étant particulièrement destructeurs, appelés “al-mubiqāt” (الموبقات) ou les péchés qui “ruinent”. Ceux-ci comprennent :

1. L’associationnisme ou le polythéisme (shirk)
2. La pratique de la sorcellerie
3. Le meurtre illégitime
4. Consommer de l’usure
5. S’approprier injustement les biens des orphelins
6. Fuir le champ de bataille
7. Accuser faussement les femmes chastes de fautes immorales

Ces péchés sont considérés comme ayant un impact particulièrement corrosif sur l’âme et la société.

Les Conséquences des Grands Péchés

Implications dans cette Vie et l’Au-delà

Les grands péchés entraînent non seulement des conséquences spirituelles, telles que l’éloignement de la miséricorde divine, mais peuvent aussi avoir des répercussions légales dans un cadre islamique, comme l’application de peines spécifiques (hudūd). Par exemple, le vol peut entraîner l’amputation, et le faux témoignage peut conduire à des sanctions sévères.

La Repentance et le Pardon

L’Islam enseigne que le repentir sincère (tawbah) est la clé pour obtenir le pardon de Dieu. Même les plus grands péchés peuvent être pardonnés si la personne se repent sincèrement, abandonne le péché, et s’engage à ne pas le répéter.

Débats et Interprétations Érudits

Diversité des Opinions sur les Grands Péchés

Les savants musulmans ont discuté en profondeur sur ce qui constitue un grand péché, menant à diverses interprétations et opinions. Certains se réfèrent directement aux textes sacrés pour identifier ces péchés, tandis que d’autres considèrent le contexte et l’intention derrière les actions.

Rôle des Hadiths et des Versets Coraniques

Les hadiths (paroles et actions du Prophète Muhammad) et les versets du Coran sont cruciaux pour comprendre et identifier les grands péchés. Ils fournissent non seulement des exemples spécifiques de ces péchés mais offrent également des conseils sur la manière de les éviter et de chercher le pardon.

La compréhension des grands péchés en Islam est essentielle pour tout croyant désirant mener une vie pieuse et conforme aux enseignements du Prophète Muhammad. Reconnaître ces péchés, comprendre leurs conséquences, et chercher sincèrement le pardon sont des étapes cruciales sur le chemin de la piété et de la crainte révérencielle d’Allah.

Le Jugement du Commetteur d’un Grand Péché

Le jugement du commetteur d’un grand péché a fait l’objet de débats parmi les fidèles, et ce débat représente l’une des premières divergences apparues dans l’Islam sur les questions fondamentales de la religion$17$. Les opinions à ce sujet se répartissent en deux extrêmes et une position médiane :

• L’extrême rigueur :

Il y a deux groupes dans cette catégorie :

Le premier : Les Kharijites, qui furent les premiers à déclarer mécréants les personnes de la même foi pour des péchés ; selon leur propre interprétation des péchés. Ils affirmaient qu’il n’y avait que deux types de personnes : le croyant, qui accomplit toutes les obligations et évite tous les interdits, et le mécréant, qui ne fait pas cela et est éternellement damné en enfer. Cette croyance est invalide, comme l’illustrent de nombreuses preuves du Coran et de la Sunnah. Par exemple, Allah a ordonné de couper la main du voleur sans le tuer, ce qui aurait été requis s’il avait été un apostat, car le Prophète (paix et bénédictions sur lui) a dit :

“Celui qui change sa religion, tuez-le” 18

et

“Le sang d’un musulman qui atteste qu’il n’y a de divinité qu’Allah et que je suis le messager d’Allah, ne peut être légitimement versé que dans trois cas : meurtre, adultère légalement marié, et apostasie, abandonnant la communauté” 19

Allah a également ordonné la flagellation pour l’adultère et la calomnie, et le Prophète (paix et bénédictions sur lui) a fouetté ceux qui buvaient de l’alcool mais ne les a pas tués. Il est rapporté qu’un homme à l’époque du Prophète, nommé Abdullah et surnommé “âne”, faisait rire le Prophète (paix et bénédictions sur lui) et avait été fouetté pour avoir bu. Un jour, il fut amené pour être fouetté à nouveau, et quelqu’un a maudit cet homme, mais le Prophète (paix et bénédictions sur lui) a dit:

“Ne le maudissez pas ; par Allah, je sais qu’il aime Allah et Son messager” 20

Ainsi, le Prophète (paix et bénédictions sur lui) a interdit de maudire cet homme en particulier et a attesté de son amour pour Allah et Son messager, bien qu’il ait généralement maudit celui qui boit de l’alcool.

De plus, Allah a déclaré :

“{Et si deux groupes de croyants se battent, réconciliez-les. Si l’un d’eux oppresse l’autre, combattez celui qui oppresse jusqu’à ce qu’il revienne à l’ordre d’Allah. S’il revient, faites la paix entre eux avec équité et soyez équitables, car Allah aime ceux qui sont équitables. * Les croyants ne sont que des frères. Réconciliez donc vos frères, et craignez Allah, afin que vous receviez la miséricorde}” Al−Hujurat:9−10

Allah les a décrits comme croyants et frères et nous a ordonné de réconcilier entre eux, malgré le combat qui a eu lieu entre eux.

La deuxième : Les Mu’tazilites, qui se sont retirés de la communauté après la mort de Hassan al-Basri. Ce sont Amr ibn Ubayd, Wasil ibn Ata al-Ghazzal et leurs disciples. Ils ont déclaré que les auteurs de grands péchés ne peuvent être ni qualifiés de croyants ni de mécréants, mais plutôt de pécheurs, occupant une position intermédiaire. Ils n’ont pas suivi les Kharijites en les qualifiant de mécréants et ont nié l’intercession du Prophète (paix et bénédictions sur lui) pour les grands pécheurs de sa communauté et ont affirmé qu’aucun ne sortirait de l’enfer une fois entré. Ils ont dit qu’il n’y a que deux types de personnes : le bienheureux qui ne sera pas puni, et le misérable qui ne jouira pas, le misérable étant de deux types : mécréant et pécheur. Ils disaient, comme les Kharijites, que celui qui commet un grand péché restera éternellement en enfer, mais ils ont affirmé qu’il ne sera pas au même niveau que les mécréants, mais subira un châtiment moins sévère.

Al-Qadi Abdul-Jabbar al-Hamdani, un Mu’tazilite, a dit :

“Le commetteur d’un grand péché a un nom et un statut intermédiaires. Il n’est ni appelé mécréant ni croyant, mais plutôt pécheur. De même, son jugement n’est ni celui d’un mécréant ni celui d’un croyant ; il a plutôt un troisième jugement, qui est une position intermédiaire” $21$.

Cette opinion fut la première divergence des Mu’tazilites avec la communauté, elle est apparue lorsqu’un homme est entré chez Hassan al-Basri et a dit :

“Ô Imam de la religion, un groupe est apparu de notre temps qui déclare mécréants ceux qui commettent de grands péchés – se référant aux Kharijites – et un autre groupe qui retarde les grands péchés, disant qu’aucun péché ne nuit avec la foi, tout comme aucune obéissance n’est utile avec la mécréance. Comment devons-nous croire à cela ?” Hassan al-Basri a réfléchi, et avant qu’il ne réponde, Wasil ibn Ata a dit: “Je ne dis pas que le commetteur d’un grand péché est croyant ou mécréant.” Puis il s’est levé vers un pilier de la mosquée et a commencé à convaincre un groupe de disciples de Hassan al-Basri de sa réponse, affirmant que le commetteur d’un grand péché n’est ni croyant ni mécréant, et qu’il occupe une position intermédiaire, disant : “Le croyant est un nom de louange, et le pécheur ne mérite pas de louanges, donc il n’est pas croyant, et il n’est pas non plus mécréant ; car il atteste les deux témoignages, donc s’il meurt sans se repentir, il sera éternellement en enfer ; car il n’y a que deux groupes dans l’au-delà : un groupe au paradis et un groupe dans la fournaise ardente, mais il sera soulagé et son niveau sera au-dessus des niveaux des mécréants.” Hassan al-Basri a alors dit : “Wasil s’est retiré de nous ; c’est pourquoi lui et ses disciples ont été appelés Mu’tazilites” 22

Les Mu’tazilites sont réfutés de la même manière que les Kharijites, en leur disant : tout comme les Kharijites ont divisé les gens en croyant sans péché et en mécréant sans bonne action, vous avez divisé les gens en croyant sans péché, et en mécréant et pécheur sans bonne action. Si toutes les bonnes actions de ce dernier sont annulées et qu’il est éternellement en enfer, il mérite la haine pure, le meurtre et l’esclavage, tout comme l’apostat. Allah a dit dans Son Livre :

“{Certes, Allah ne pardonne pas qu’on lui associe quoi que ce soit, mais Il pardonne en deçà à qui Il veut. Et quiconque associe quoi que ce soit à Allah, a vraiment forgé un péché énorme}” An−Nisa:48

Il a fait de tout ce qui est en dessous de ce shirk dépendant de Sa volonté, et il n’est pas permis de l’interpréter comme s’appliquant au repentant, car pour le repentant, il n’y a pas de différence entre le shirk et autre chose, comme Allah l’a dit dans un autre verset :

“{Dis : Ô Mes serviteurs qui avez été prodigues à votre propre détriment, ne désespérez pas de la miséricorde d’Allah. Car Allah pardonne tous les péchés. Oui, c’est Lui le Pardonneur, le Très Miséricordieux}” Az−Zumar:53

Ici, Allah généralise et exprime clairement que le repentir est destiné aux repentants. En revanche, dans le verset précédent, Il spécifie et conditionne.

Allah a également déclaré:

“{Nous avons légué le Livre à ceux de Nos serviteurs que Nous avons choisis : parmi eux, certains se font du tort à eux-mêmes, d’autres sont modérés, et d’autres encore sont, par la volonté d’Allah, précurseurs dans les bonnes œuvres. Voilà la grâce immense}” Fatir:32.

Allah a divisé la communauté qu’Il a choisie et à qui Il a légué le Livre en trois catégories : ceux qui se font du tort, ceux qui sont modérés, et ceux qui sont précurseurs dans les bonnes œuvres. Ces trois catégories correspondent aux trois niveaux mentionnés dans le hadith de Jibril : l’Islam, la Foi, et la Bienfaisance.

Il est évident que celui qui se fait du tort à lui-même n’est pas celui qui évite les grands péchés et se repent de tous ses péchés ; car celui qui est dans cet état serait considéré comme modéré ou précurseur dans les bonnes œuvres. Comme aucun descendant d’Adam n’est exempt de péché, mais celui qui se repent devient modéré ou précurseur dans les bonnes œuvres. De même, celui qui évite les grands péchés voit ses mauvaises actions expiées, comme Allah l’a dit:

“{Si vous évitez les grands péchés qui vous sont interdits, Nous effacerons vos mauvaises actions et vous admettrons avec honneur}” An−Nisa:31

Il doit donc y avoir ceux qui se font du tort à eux-mêmes et qui sont promis au Paradis, même après avoir été punis pour purifier leurs péchés. Les hadiths du Prophète (paix et bénédictions sur lui) qui affirment que des gens seront sortis de l’Enfer après y être entrés et que le Prophète (paix et bénédictions sur lui) intercédera pour des personnes qui sont entrées en Enfer, puis sorties de l’Enfer pour entrer au Paradis, sont des preuves contre les deux groupes qui prônent la punition éternelle : les Kharijites et les Mu’tazilites $23$.

• L’extrême négligence:

Ce sont les Murji’ah qui disent : que celui qui commet un grand péché est entièrement croyant et qu’il mérite le pardon dans l’au-delà. Ils affirment que le péché ne nuit pas à la foi, tout comme l’obéissance ne profite pas à la mécréance. Parmi eux, il y a les Waqfites qui disent qu’ils ne savent pas si quelqu’un parmi ceux qui adhèrent au monothéisme entrera en Enfer ou non. Cela est également attribué à certains groupes chiites et ash’arites. Quant aux Murji’ah extrémistes, ils disent qu’aucun de ceux qui adhèrent au monothéisme n’entrera en Enfer.

Quant à leur affirmation : que le commetteur d’un grand péché est entièrement croyant, elle est réfutée par les hadiths qui indiquent l’absence de foi complète chez celui qui commet un grand péché, comme le dit le Prophète (paix et bénédictions sur lui) :

“L’adultère n’adultère pas lorsqu’il commet l’adultère tout en étant croyant, et ne boit pas de vin lorsqu’il boit tout en étant croyant, et ne vole pas lorsqu’il vole tout en étant croyant, et ne pille pas une dépouille que les gens lèvent leurs yeux sur lui lorsqu’il la pille tout en étant croyant” 24

Al-Nawawi a dit : “Ce hadith a fait l’objet de divergences parmi les érudits quant à son sens ; le discours correct que les experts ont déclaré est qu’il signifie qu’il ne commet pas ces péchés tout en étant complètement croyant, et c’est l’un des discours qui nient quelque chose et signifient nier sa perfection et son choix, comme on dit : il n’y a pas de savoir sauf ce qui est utile, et pas de richesse sauf les chameaux, et pas de vie sauf la vie de l’au-delà” $25$.

Ibn Battal a dit : “Les gens du Sunnah ont interprété la foi ici comme étant complète ; car le pécheur devient dans un état inférieur de foi par rapport à celui qui ne pèche pas” $26$.

Quant à leur affirmation : qu’il sera pardonné dans l’au-delà, elle est réfutée par les hadiths qui indiquent que certains monothéistes entreront en Enfer, ou les hadiths qui indiquent que celui qui commet un grand péché sera à la merci d’Allah dans l’au-delà, comme le dit le Prophète (paix et bénédictions sur lui) :

“Échangez avec moi sur le fait de ne pas associer quoi que ce soit à Allah, de ne pas voler, de ne pas commettre d’adultère, de ne pas tuer vos enfants, de ne pas apporter de calomnie que vous inventez entre vos mains et vos pieds, et de ne pas désobéir dans le bien. Celui parmi vous qui tient sa promesse, sa récompense est auprès d’Allah, et celui qui commet l’un de ces actes et est puni dans ce monde, c’est une expiation pour lui, et celui qui commet l’un de ces actes et Allah le couvre, alors son affaire est entre les mains d’Allah ; s’Il veut, Il le punira, et s’Il veut, Il le pardonnera” $27$.

Ibn Hajar a dit : “Son dire : ‘S’Il veut, Il le punira, et s’Il veut, Il le pardonnera’ inclut celui qui se repent de cela et celui qui ne se repent pas, et un groupe a dit que celui qui se repent n’est plus tenu pour responsable, et malgré cela, il ne doit pas être sûr du stratagème d’Allah ; car il n’a aucune connaissance de savoir si sa repentance a été acceptée ou non” 28.

Et les hadiths du Prophète (paix et bénédictions sur lui) qui affirment qu’il fera sortir des gens de l’Enfer après y être entrés, et qu’il intercédera pour des gens qui sont entrés en Enfer, sont des preuves contre ceux qui nient qu’aucun des monothéistes n’entrera en Enfer, ou ceux qui sont incertains à ce sujet.

Ibn Al-Qayyim a dit : “Quant aux Murji’ah, ils permettent qu’aucun des monothéistes n’entre en Enfer, et cela contredit ce qui est connu et transmis par des preuves de la Sunnah sur l’entrée de certains grands pécheurs en Enfer, puis leur sortie par l’intercession. Avec cette transmission qui ne peut être repoussée, il n’est pas permis de dire qu’il est possible qu’aucun d’entre eux n’entre en Enfer ; il doit y avoir certains qui y entrent, et ce sont ceux dont les balances sont légères et dont les mauvaises actions l’emportent, comme l’ont dit les Compagnons, et Abu Muhammad Ibn Hazm l’a rapporté comme un consensus parmi les gens du Sunnah” .

Il convient de noter que les déviations des Kharijites, des Mu’tazilites et des Murji’ah dans ce domaine sont dues à leur affirmation que la foi est une chose unique qui ne peut être divisée ni fractionnée, et que si une partie en est perdue, tout est perdu.

Ibn Taymiyyah a dit : “Quant à celui qui dit que si une partie de la foi est perdue, tout est perdu, cela est interdit, et c’est la base sur laquelle sont fondées les hérésies dans la foi, car ils ont pensé que si une partie est perdue, rien ne reste. Puis les Kharijites et les Mu’tazilites ont dit : c’est l’ensemble de ce qu’Allah et Son messager (paix et bénédictions sur lui) ont ordonné, et c’est la foi complète, donc si quelque chose en est perdue, rien de la foi ne reste chez son détenteur, qui sera alors condamné éternellement en enfer.
Les Murji’ah, quant à eux, malgré leurs différentes branches, ont dit : les grands péchés et l’abandon des obligations évidentes n’ôtent rien à la foi ; car si une partie de celle-ci était perdue, il ne resterait rien, et donc la foi serait une entité unique où le pieux et le débauché seraient égaux” 30.

• La position d’Ahlu as-Sunnah wa al-Jama’ah:

C’est le juste milieu entre l’extrémisme des Kharijites et des Mu’tazilites, et la négligence des Murji’ah. Ahlu as-Sunnah déclare que celui qui commet un grand péché est croyant par sa foi, mais pécheur par son grand péché ; car en commettant un grand péché, il diminue la perfection de sa foi obligatoire, sans pour autant nier l’essence de sa foi.

Ils disent : Si celui qui commet un grand péché meurt sans s’être repenti de son péché, il est alors soumis à la volonté d’Allah. Si Allah le veut, Il lui pardonnera et l’admettra au Paradis sans punition, et s’il le veut, il le punira pour un temps, puis le sortira de l’Enfer et l’admettra au Paradis 31. Ils sont unanimes à dire que le Prophète (paix et bénédictions sur lui) intercédera pour les grands pécheurs, et qu’aucun adhérent au monothéisme ne restera éternellement en Enfer 32.

Ibn Taymiyyah dit : “Il y a un consensus parmi les Compagnons, les Successeurs et tous les Imams musulmans que personne ayant ne serait-ce qu’un atome de foi ne restera éternellement en Enfer, et ils sont également unanimes que notre Prophète intercédera pour les grands pécheurs de sa communauté” 33.

Quant à leur affirmation : que le commetteur d’un grand péché est appelé croyant en raison de la base de sa foi, cela est indiqué par le verset où Allah dit :

“{Et si deux groupes parmi les croyants se battent, alors faites la paix entre eux…} jusqu’à Sa parole : {Les croyants ne sont que des frères, donc faites la paix entre vos frères}” Al−Hujurat:9,10

où Allah les qualifie de croyants malgré le fait qu’ils se battent, ce qui est considéré comme l’un des plus grands péchés, montrant qu’ils n’ont pas complètement perdu leur foi 34, c’est pourquoi l’Imam Malik disait : “Les pécheurs – c’est-à-dire ceux qui commettent de grands péchés – sont des croyants pécheurs” 35.

Quant à l’affirmation qu’ils ne sont pas entièrement croyants, cela est indiqué par le hadith du Prophète (paix et bénédictions sur lui) : “L’adultère n’est pas croyant lorsqu’il commet l’adultère, et celui qui boit de l’alcool n’est pas croyant lorsqu’il boit, et celui qui vole n’est pas croyant lorsqu’il vole, et celui qui pille une dépouille sous les yeux des gens n’est pas croyant lorsqu’il pille” 36.

Muhammad ibn Ali a dit : “Le Prophète (paix et bénédictions sur lui) a dit :

‘L’adultère n’est pas croyant lorsqu’il commet l’adultère, et celui qui vole n’est pas croyant lorsqu’il vole…’ Il signifie qu’il sort de la foi complète vers l’Islam, mais ne sort jamais complètement de l’Islam. S’il se repent, Allah lui pardonnera et lui rendra sa foi complète” $37$

Lorsqu’on a demandé à Ahmad ibn Hanbal à propos de ce hadith, il a répondu : “Celui qui commet ces quatre péchés, ou quelque chose de similaire, ou pire, est un musulman mais je ne l’appelle pas croyant. Celui qui commet moins que cela – c’est-à-dire moins que les grands péchés – je l’appelle croyant, mais avec une foi incomplète” 38.

Ibn Taymiyyah a dit : “Ahmad ibn Hanbal n’a jamais voulu dire qu’il a complètement privé ces personnes de toute foi, car il a explicitement affirmé à plusieurs reprises que les grands pécheurs ont une part de foi qui les sortira de l’Enfer, et il a utilisé comme preuve la parole du Prophète (paix et bénédictions sur lui) :

‘Sortez de l’Enfer celui qui a dans son cœur ne serait-ce qu’un atome de foi’ 39

Ce n’est pas sa parole, ni celle d’aucun des Imams d’Ahlu as-Sunnah ; ils sont tous d’accord sur le fait que les pécheurs qui ne sont pas hypocrites ont une part de foi qui les sortira de l’Enfer, ce qui les distingue des mécréants et des hypocrites. Mais le fait d’avoir une part de foi ne signifie pas nécessairement qu’ils portent le nom de ‘croyant’ dans son sens absolu et louable” 40.

Mais peut-on dire absolument que celui qui commet un grand péché est croyant ?

“Il est correct de spécifier : lorsqu’on demande sur les affaires de ce monde, comme son affranchissement dans l’expiation, on dit qu’il est croyant. De même, lorsqu’on demande s’il entre dans la catégorie des croyants, mais lorsqu’on demande sur son statut dans l’au-delà, on dit que ce type de croyant n’est pas parmi ceux qui sont promis au Paradis ; mais il a une foi qui l’empêche de rester éternellement en Enfer, et il entrera au Paradis après avoir été puni en Enfer, à moins qu’Allah ne lui pardonne ses péchés. C’est pourquoi certains ont dit : il est croyant par sa foi, pécheur par son grand péché, ou croyant avec une foi incomplète” $41$.

Et quant à leur affirmation qu’il est soumis à la volonté d’Allah dans l’au-delà, cela est indiqué par le hadith du Prophète (paix et bénédictions sur lui) :

“Et celui qui commet l’un de ces actes et Allah le couvre, alors son affaire est entre les mains d’Allah ; s’il veut, Il le punit, et s’il veut, Il lui pardonne” $42$.

Et quant à leur affirmation que le Prophète (paix et bénédictions sur lui) intercèdera pour les grands pécheurs, cela est indiqué par sa parole:

“Mon intercession est pour les grands pécheurs de ma communauté” 43,

et d’autres hadiths nombreux et diffusés sur ce sens.

Ibn Taymiyyah a dit : “Il est établi par la Sunnah largement diffusée et transmise par consensus de la communauté que le Prophète (paix et bénédictions sur lui) est l’intercesseur accepté, et qu’il intercédera pour la création au Jour de la Résurrection, et que les gens demanderont son intercession, et ils sont également d’accord sur le fait qu’il intercédera pour les grands pécheurs, et qu’aucun des monothéistes ne restera éternellement en Enfer” $4$.

Références

• Al-Kabair (Les Grands Péchés) – Al-Hafiz Al-Dhahabi: à commander ici
• Al-Zawajir ‘An Iqtiraf Al-Kaba’ir (Les Avertissements Contre les Grands Péchés) – Ibn Hajar Al-Haytami
• $1$ Voir : Lisan al-Arab (12/13), Tafsir al-Tabari (12/204), Tafsir Ibn Kathir (2/477).
• $2$ Voir : Sharh Usool I’tiqad Ahl as-Sunnah wal-Jama’ah de Al-Lalika’i (1033-1043), Al-Jawab al-Kafi d’Ibn al-Qayyim, p. 87.
• $3$ Voir : Sharh Usool I’tiqad Ahl as-Sunnah wal-Jama’ah (1922).
• $4$ Rapporté par Al-Tabari dans son Tafsir (5/41) et Al-Lalika’i dans Sharh Usool I’tiqad Ahl as-Sunnah wal-Jama’ah (1917, 1918).
• $5$ Voir : Sharh Usool I’tiqad Ahl as-Sunnah wal-Jama’ah (1919).
• $6$ Voir : Al-Jawab al-Kafi, p. 88.
• $7$ Majmu’ al-Fatawa (11/655).
• $8$ Shu’ab al-Iman d’Al-Bayhaqi (292), voir aussi Madarij as-Salikin (1/321).
• $9$ Shu’ab al-Iman (1/273).
• $10$ Voir : Al-Jawab al-Kafi, p. 89.
• $11$ Madarij as-Salikin (1/323).
• $12$ Madarij as-Salikin (1/323).
• $13$ Rapporté par Muslim (2687) d’après le récit d’Abu Dharr al-Ghifari, que Dieu soit satisfait de lui.
• $14$ Voir : Madarij as-Salikin (1/325-327).
• $15$ Voir : Al-Kaba’ir d’Adh-Dhahabi, p. 6.
• $16$ Majmu’ al-Fatawa (11/650-655), résumé.
• $17$ Voir : Majmu’ al-Fatawa (7/478).
• $18$ Rapporté par Al-Bukhari (6922) d’après Ibn Abbas, que Dieu soit satisfait d’eux.
• $19$ Rapporté par Al-Bukhari (6878) et Muslim (1676), d’après Abdullah ibn Mas’ud, que Dieu soit satisfait de lui.
• $20$ Rapporté par Al-Bukhari (6780) d’après Omar ibn al-Khattab, que Dieu soit satisfait de lui.
• $21$ Sharh al-Usool al-Khamsa, p. 697.
• $22$ Al-Mawaqif de Al-Iji (3/658).
• $23$ Voir : Majmu’ al-Fatawa (7/484-487).
• $24$ Rapporté par Al-Bukhari (2475) et Muslim (57), d’après Abu Huraira, que Dieu soit satisfait de lui.
• $25$ Sharh an-Nawawi sur Sahih Muslim (2/41).
• $26$ Fath al-Bari (10/34).
• $27$ Rapporté par Al-Bukhari (18) et Muslim (1709), d’après Ubada ibn as-Samit, que Dieu soit satisfait de lui.
• $28$ Fath al-Bari (1/68).
• $29$ Tarīq al-Hijratayn, p. 569.
• $30$ Majmu’ al-Fatawa (7/223).
• $31$ Voir : Majmu’ al-Fatawa (6/175).
• $32$ Voir : Al-Radd ala al-Bakri, p. 412.
• $33$ Majmu’ al-Fatawa (7/222).
• $34$ Voir : Majmu’ al-Fatawa (7/355).
• $35$ Al-Jami’ li Abi Zayd al-Qayrawani, p. 123.
• $36$ Rapporté par Al-Bukhari (2475) et Muslim (57), d’après Abu Huraira, que Dieu soit satisfait de lui, déjà mentionné.
• $37$ As-Sunnah d’Al-Khallal (1083) et As-Sunnah d’Abdullah ibn Ahmad (757).
• $38$ Majmu’ al-Fatawa (7/254).
• $39$ Rapporté par Al-Bukhari (7510) et Muslim (193), d’après Anas ibn Malik, que Dieu soit satisfait de lui.
• $40$ Majmu’ al-Fatawa (7/257)
• $41$ Majmu’ al-Fatawa (7/355,354).
• 42 Rapporté par Al-Bukhari (18) et Muslim (1709), d’après Ubada ibn as-Samit, que Dieu soit satisfait de lui, déjà cité.
• 43 Rapporté par Ahmad (12810), Abu Dawud (4739), et At-Tirmidhi (2435), d’après Anas ibn Malik, que Dieu soit satisfait de lui. Al-Ajloni dans Kashf al-Khafa (2/14) a déclaré : Ibn Khuzaymah et Ibn Hibban l’ont authentifié, et At-Tirmidhi a dit : Hadith Hasan Sahih Gharib. Al-Bayhaqi a dit : Sa chaîne de transmission est authentique. Al-Albani l’a également authentifié dans Sahih al-Jami’ (3714).
• 44 Al-Radd ala al-Bakri, p. 412.
• Auteur : Ihab Kamal Ahmad