Règlement de la Khutbah de l’Aïd
Il est recommandé aux musulmans d’assister à la Khutbah de l’Aïd et de l’écouter attentivement. Cette pratique est considérée comme une Sunnah (tradition prophétique) qui apporte des récompenses à ceux qui la suivent. Elle n’est pas obligatoire et ne fait pas l’objet d’une sanction en cas de non-respect. La preuve de son caractère non obligatoire réside dans les actions du Prophète Mohammed (paix et bénédictions sur lui) et de ses califes bien guidés après lui.
Un hadith rapporté par Abdullah ibn Sa’ib (qu’Allah soit satisfait de lui) dit :
« J’ai assisté à l’Aïd avec le Messager d’Allah (paix et bénédictions sur lui). Après avoir accompli la prière, il a dit : ‘Nous allons prononcer le sermon ; celui qui veut rester pour l’écouter peut le faire, et celui qui veut partir peut partir’ » (Hadith Sahih).
Cela montre clairement que le fidèle qui accomplit la prière de l’Aïd et quitte ensuite sans écouter le sermon, sa prière reste valide.
La Khutbah de l’Aïd
La Khutbah de l’Aïd suit la prière, ce qui signifie qu’elle a lieu après l’achèvement de la prière de l’Aïd. Une fois la prière terminée, l’imam se tourne vers les fidèles et prononce deux sermons, à l’instar de ceux du vendredi. L’imam s’assoit brièvement entre les deux sermons avant de se lever à nouveau pour le second, comme mentionné dans le hadith de Jabir ibn Abdullah (que Dieu soit satisfait de lui) : « Le Messager de Dieu (que la paix et les bénédictions de Dieu soient sur lui) sortit le jour de l’Aïd al-Fitr ou de l’Aïd al-Adha, prêcha debout, puis s’assit un moment avant de se relever » (Rapporté par Muslim).
Voici quelques points essentiels concernant les caractéristiques de la Khutbah de l’Aïd :
- Elle commence par des takbirs : Il est recommandé de commencer la Khutbah de l’Aïd par des takbirs (formule « Allahu Akbar », signifiant « Dieu est le plus grand »). Il est également conseillé de continuer les takbirs pendant le sermon, ce qui est différent de la Khutbah du vendredi qui débute par des louanges à Dieu.
- Nombre de takbirs dans le premier et le second sermon : La majorité des savants estiment que la Khutbah de l’Aïd doit contenir neuf takbirs consécutifs dans le premier sermon et sept dans le second. Cependant, l’école malékite ne fixe pas un nombre précis de takbirs. Pour l’école hanafite, il est recommandé à l’imam de prononcer quatorze takbirs après avoir terminé le sermon avant de descendre du minbar.
Les Piliers de la Khutbah de l’Aïd
Les piliers de la Khutbah de l’Aïd sont similaires à ceux de la Khutbah du vendredi, à l’exception de l’ouverture. La Khutbah de l’Aïd commence par des takbirs (grands Allahu Akbar), tandis que la Khutbah du vendredi débute par des louanges à Allah. Le nombre de piliers varie selon les écoles de jurisprudence :
École Hanafite
Pour l’école hanafite, la Khutbah de l’Aïd se compose d’un seul pilier, comme pour la Khutbah du vendredi : le dhikr, que celui-ci soit long ou court. Cela signifie que la Khutbah est validée par une simple louange à Allah (al-hamd) ou une glorification (tasbih) ou une proclamation de la grandeur d’Allah (tahlil). De plus, la deuxième Khutbah de l’Aïd est considérée comme une sunnah (tradition) et non une obligation.
École Malékite
Selon l’école malékite, la Khutbah de l’Aïd comprend également un seul pilier, comme pour la Khutbah du vendredi, qui est la présence d’un avertissement ou d’une bonne nouvelle durant la Khutbah.
École Hanbalite
L’école hanbalite propose trois piliers pour la Khutbah de l’Aïd :
- La prière sur le Prophète ﷺ : Ils exigent que la mention de la prière sur le Prophète comprenne explicitement le terme “salat” pour être valide.
- Lecture d’un verset du Coran : Le verset doit être autonome dans son sens et contenir une règle ou une leçon.
- Recommandation de la piété : En plus des takbirs d’ouverture qui sont sunnah et non un pilier obligatoire de la Khutbah.
École Shaféite
L’école shaféite identifie quatre piliers pour la Khutbah de l’Aïd :
- La prière sur le Prophète ﷺ : Cette prière doit être mentionnée dans les deux Khutbahs.
- La recommandation de la piété : La recommandation doit figurer dans les deux Khutbahs, sans nécessiter spécifiquement le terme “piété”, mais tout mot qui en suggère le sens.
- Lecture d’un verset du Coran : Le verset doit être lu dans une des deux Khutbahs, de préférence la première. Il doit comporter une promesse, une menace, une règle, une histoire ou une information complète.
- La supplication pour les croyants : Ce doit être fait durant la deuxième Khutbah et concerner les affaires de l’au-delà. La supplication doit inclure tous les présents dans l’intention de l’orateur.
Conditions de la Khutbah de l’Aïd
Les conditions de la Khutbah de l’Aïd varient selon chaque école de jurisprudence. Voici un aperçu des principales exigences :
École Malékite
- La Khutbah de l’Aïd doit être en langue arabe, même si l’auditoire ne comprend pas cette langue. Si personne parmi les présents ne maîtrise l’arabe, la khutbah n’est alors pas obligatoire et elle ne peut en aucun cas être prononcée dans une autre langue. Si cette condition n’est pas respectée, la prière de l’Aïd devient invalide pour eux.
- Les deux prêches doivent suivre immédiatement la prière de l’Aïd et ne doivent pas la précéder. Si l’imam fait sa khutbah avant la prière, il est recommandé de la répéter après la prière, à condition que le délai ne soit pas trop long.
École Hanafite
Un seul auditeur est nécessaire pour valider la khutbah, à condition qu’il remplisse les critères requises pour la prière du vendredi. Il n’est pas nécessaire qu’il entende le prêche, que ce soit en raison de l’éloignement ou de la surdité, sa présence seule suffit. Il est également stipulé que cet auditeur soit un homme, même malade ou en voyage; la présence des femmes ou des enfants n’est pas suffisante.
Les Hanafites ne considèrent pas que la khutbah de l’Aïd doive obligatoirement être en arabe, contrairement aux Malékites. De plus, elle peut être prononcée avant ou après la prière, bien que le faire avant soit contraire à la tradition prophétique. Cependant, elle n’a pas besoin d’être répétée après la prière.
École Shaféite et Hanbalite
Les Shaféites posent deux conditions pour la validité de la khutbah de l’Aïd :
- Le prêcheur doit prononcer à voix haute les quatre éléments constitutifs de la khutbah, qui devraient être audibles par quarante personnes minimum (le nombre requis pour la prière du vendredi). Il n’est pas nécessaire qu’ils entendent effectivement, mais qu’ils se tiennent près et soient prêts à écouter; si un empêchement comme le sommeil ou la surdité empêche l’écoute, la khutbah n’est pas valide.
- Les deux prêches doivent être faits après la prière de l’Aïd, pas avant. Si elles sont prononcées avant, elles ne sont pas considérées valides et il est recommandé de les refaire après la prière, même si le délai est long.
Les Hanbalites partagent les mêmes conditions que les Shaféites pour la khutbah de l’Aïd, insistant également sur l’importance de la proclamation à haute voix et sur l’exigence que la prière précède les prêches.
Les sounnahs de la Khutbah de l’Aïd
Parmi les sounnahs recommandées pour la Khutbah de l’Aïd, on trouve :
- La Khutbah doit comporter deux sermons, similaires à ceux de la prière du vendredi en termes de piliers, conditions, sounnahs et actes déconseillés.
- Ces deux sermons doivent avoir lieu après la prière de l’Aïd, et non avant.
- Chaque sermon doit commencer par des formules de Takbir, comme indiqué précédemment. Selon les écoles malikite et hanafite, il est recommandé que les fidèles prononcent les Takbirs en silence pendant que l’imam les récite, cependant la majorité des juristes interdit toute conversation durant le sermon, même s’il s’agit de formules de dhikr.
- Les sermons de l’Aïd doivent être courts et ne pas s’éterniser.
- Leur langage doit être une langue arabe éloquente et expressive.
- Il est recommandé de réciter la sourate “Qaf” dans l’un des deux sermons et que l’imam prie pour les musulmans et leurs dirigeants dans le deuxième sermon.
- Le second sermon de l’Aïd doit se terminer par des formules de demande de pardon (istighfar).
Makrouhat de la Khutbah de l’Aïd
Selon les Shaféites
- Il est déconseillé de parler pendant la Khutbah de l’Aïd.
- Les participants ne doivent pas faire l’appel à la prière (Adhan) pendant le discours de l’imam.
- S’asseoir sur les fesses tout en enroulant les genoux et les jambes vers le ventre, et les maintenir avec les bras (posture d’al-ihtibaa) est déconseillé pour les participants.
- L’imam doit éviter de se tourner excessivement, de faire des gestes avec les mains ou de taper sur le minbar lors du deuxième discours.
Selon les Hanbalites
- Il est déconseillé de tourner le dos à l’imam pendant la khutbah.
- Lever les mains pendant les invocations faites dans la khutbah est à éviter, bien qu’ils permettent la posture d’al-ihtibaa si les parties intimes sont couvertes, car certains compagnons du Prophète – que Dieu soit satisfait d’eux – le faisaient.
Points communs entre les Shaféites et les Hanbalites
- Il est déconseillé d’enchevêtrer les doigts dans la mosquée ou en chemin vers la mosquée.
- Pendant la khutbah, il ne faut pas s’amuser ou manipuler quelque chose comme des cailloux. Selon les mots du Prophète – que la paix et les bénédictions soient sur lui – : « Quiconque touche les cailloux a parlé en vain. »
- Il est aussi déconseillé de boire de l’eau pendant la khutbah, sauf en cas de soif intense.
Les règles précitées visent à préserver le respect et la concentration pendant ce moment sacré, et varient légèrement selon les écoles juridiques.
Matière de la Khutbah de l’Aïd
La matière de la khutbah de l’Aïd varie en fonction des deux fêtes religieuses musulmanes, Aïd al-Fitr et Aïd al-Adha. Cette diversité de contenu dans les sermons a une grande sagesse, car elle permet d’adresser des sujets pertinents et adaptés à la réalité des fidèles, tout en leur rappelant les préceptes nécessaires pour chaque saison de culte.
Khutbah de l’Aïd al-Fitr
Après la prière d’Aïd al-Fitr, l’imam exhorte les fidèles présents et ceux qui écoutent le sermon à s’acquitter de la Zakat al-Fitr. Il rappelle son importance, ainsi que ceux pour qui elle est obligatoire, le moment de son accomplissement, et combien elle est cruciale. L’imam souligne également l’importance de la Zakat al-Fitr, tant du point de vue religieux pour obtenir la récompense divine que du point de vue social pour promouvoir la solidarité au sein de la communauté, il rappelle que l’acceptation du jeûne du mois de Ramadan par Dieu est conditionnée à l’acquittement de la Zakat al-Fitr.
Khutbah de l’Aïd al-Adha
Le contenu du sermon après la prière d’Aïd al-Adha concerne les sacrifices rituels, leur statut juridique, leur importance et leur vertu. L’imam aborde également toutes les régulations relatives aux sacrifices, précisant ce qui est acceptable et ce qui ne l’est pas.
Nombre de Khutbahs dans la prière de l’Aïd et leur moment
Nombre de Khutbahs de la prière de l’Aïd
Selon les érudits musulmans, le nombre de Khutbahs (sermons) dans la prière de l’Aïd fait l’objet de diverses opinions :
- La majorité des savants, incluant les quatre grandes écoles de jurisprudence, estiment que la prière de l’Aïd devrait comprendre deux Khutbahs, séparées par une pause où l’imam s’assoit, similaire à la Khutbah du vendredi. Cette opinion s’appuie sur le hadith suivant :
“Le Messager d’Allah (paix et bénédictions sur lui) sortit le jour de l’Aïd, fit un sermon debout, puis s’assit une brève pause avant de se lever à nouveau”.
De plus, ils ont établi cette règle par analogie avec la Khutbah du vendredi. Ibn Uthaymin ajoute une autre preuve, affirmant que le Prophète (paix et bénédictions sur lui) prononçait un seul sermon, mais se tournait ensuite vers les femmes pour les conseiller, ce qui pouvait être vu comme une deuxième Khutbah.
- Un autre groupe de savants soutient que la Khutbah de l’Aïd ne devrait inclure qu’un seul sermon. Leur argument repose sur le fait que les hadiths authentiques concernant la prière de l’Aïd ne mentionnent qu’une seule Khutbah, tandis que ceux mentionnant deux Khutbahs et une pause intermédiaire sont considérés comme faibles.
Il est important de noter que cette question du nombre de Khutbahs pour l’Aïd est une question d’ijtihad (interprétation juridique), sans texte religieux explicite la tranchant. Ainsi, l’imam est libre de juger et d’agir selon ce qu’il estime le plus proche de la tradition prophétique.
Moment de la Khutbah de l’Aïd
La Khutbah de l’Aïd est prononcée après la prière de l’Aïd, contrairement à la Khutbah du vendredi qui la précède. Cela est soutenu par le hadith d’Ibn Abbas (que Dieu l’agrée) :
“J’ai assisté à la prière de l’Aïd avec le Prophète (paix et bénédictions sur lui) ; il a prié avant le sermon”.
Références
- Les hadiths ont été rapportés par l’imam Al-Albani dans “Sahih Abi Dawud”, selon Abdullah ibn Sa’ib, numéro de référence 1155. Ce hadith est reconnu comme authentique.
- Le Ministère des Affaires Religieuses et des Affaires Islamiques (1427), dans “L’encyclopédie juridique koweïtienne” (deuxième édition), page 186, volume 19.
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- Rapporté par Al-‘Azim Abadi dans “Awn Al-Ma’bud” selon Jabir ibn Abdullah, volume 4, page 5.
- Mahmoud As-Sabki (1977), “La religion pure ou l’orientation des créatures vers la vraie religion”, Saudi Arabia: Al-Maktaba Al-Mahmoudiya As-Sabkiya, page 341, volume 4.
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- Sa’id Hawa (1994), “L’essentiel de la Sunna et sa jurisprudence : les actes d’adoration en Islam” (première édition), Egypte : Dar As-Salaam pour l’impression, l’édition et la distribution, page 1320, volume 3.
- Abdul Aziz Al-Hajilan (2002), “Le sermon du vendredi et ses règles juridiques” (première édition), Saudi Arabia : Ministère des Affaires Islamiques, page 261.
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- Rapporté par l’imam Muslim dans “Sahih Muslim”, selon Abu Hurayra, numéro de référence 857. Ce hadith est considéré comme authentique.
- Ahmad Al-Wushali, “La purification et la prière”, page 7.
- Islam Q&A, “Est-ce que le sermon de l’Aïd doit être prononcé en une ou deux parties?”.
- Ali Al-Halabi (1993), “Les règles des deux fêtes” (deuxième édition), Jordan : Dar Ibn Hazm, page 56.
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- Rapporté par l’imam Al-Bukhari dans “Sahih Al-Bukhari”, selon Abdullah ibn Abbas, numéro de référence 5880. Ce hadith est authentique.
- Ibn Al-Munzir (1985), “L’intermédiaire dans les traditions, le consensus et les différences” (première édition), Saudi Arabia : Dar Taybah, page 270, volume 4.